Demeter interdit le sexage in ovo dans son cahier des charges. Plusieurs arguments ont motivé cette décision notamment le fait que le sexage des poussins mâles représente une entrave à la biodiversité, élément essentiel de l’agriculture biodynamique.
Production d’œufs, que deviennent les poussins mâles ?
La production de poussins femelles à destination des élevages de poules pondeuses est très industrialisée, en France comme dans les autres pays européens. Jusqu’à janvier 2022, les poussins mâles (plus de 50 millions par an en France) étaient mis à mort, car jugés inutiles pour la production d’œufs. Les méthodes de destruction des poussins mâles, à savoir le broyage et le gazage, ont été interdites en janvier 2022 par le gouvernement français. En effet, une nouvelle technique est mise en avant pour différencier poussins femelles et mâles au stade embryonnaire : le sexage in ovo.
Le sexage in ovo, qu’est-ce que c’est ?
Le sexage in ovo est une technique de détection du sexe de l’embryon dans l’œuf avant la naissance. Plus précisément, le sexage in ovo permet de déterminer le sexe de l’embryon dès le 9ème jour dans l’œuf. De ce fait, les embryons femelles sont conservés et poursuivent leur croissance jusqu’à l’éclosion, les embryons mâles quant à eux sont détruits avant la naissance. Cette méthode motivée par le bien-être animal a été inventée par la start-up allemande « Respeggt » en 2018.
Pourquoi Demeter interdit le sexage in ovo ?
Bien que jugé moins cruel que le broyage et le gazage par le gouvernement français, le sexage in ovo reste un obstacle à la biodiversité en limitant la diversité génétique. En effet, en intervenant dans la gestion des naissances de poussins mâles, l’homme interfère dans le développement naturel de l’espèce.
De plus, il y a controverse quant au développement des nerfs sensoriels chez les embryons. En effet, certaines études (Bjørnstad et al. (2015) relayée par OABA1) estiment que l’embryon peut ressentir la douleur à partir du 7ème jour de couvaison. La méthode du sexage in ovo étant réalisée au 9ème jour de couvaison, l’embryon mâle pourrait percevoir la douleur lorsqu’il est détruit.
Enfin, la logique de productivité du sexage in ovo suit le même schéma que celle du broyage des poussins. L’objectif étant de se débarrasser d’une vie animale car non rentable. Selon notre vision biodynamique de l’agriculture, l’élevage et le bien-être animal doivent avoir une portée sur le long terme en poussant à la recherche de meilleures alternatives.
L’alternative novatrice de Demeter : l’élevage des poussins mâles
Le broyage et le gazage étant interdits par la loi française et le sexage in ovo interdit dans le cahier des charges Demeter, il est légitime de se demander ce que deviennent les poussins mâles dans les élevages de volailles labellisés Demeter. La réponse de Demeter est qu’il faut élever les poussins mâles.
En agriculture conventionnelle, les poussins mâles issus des races de poules pondeuses sont détruits parce qu’ils représentent un manque à gagner : ils sont inutiles dans la production d’œufs et sont trop frêles pour être vendus pour leur viande. Comme solution à ce problème, Demeter développe une nouvelle alternative avec une race à double usage pour l’élevage de poules pondeuses et de poulets de chairs. Ainsi, les poussins femelles deviennent des poules pondeuses et les poussins mâles, des poulets vendus, à quelques mois, pour leur chair. En Suisse, l’initiative se nomme « Coq en pâte »2 et en Allemagne « Petits frères des poules »3. En France, il n’existe pas encore de fermes Demeter assurant l’élevage des poussins, mais des projets sont à l’étude.
En interdisant le sexage in ovo, l’objectif de Demeter est de parvenir à un élevage de volailles qui réconcilie bien-être animal, durabilité et viabilité économique des fermes.
1 Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoir https://oaba.fr/
2 https://demeter.ch/fr/weiteres/hahn-im-glueck/
3 https://www.demeter.de/bruderhahn
Crédit photo : Yool GmbH & Co. KG, Eva Wolf.